Marie-Claire Blais, la grande dame de la littérature canadienne, a présenté à Prague sa trilogie "Soif"

Marie-Claire Blais
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Née dans une famille ouvrière de Québec, elle publie son premier roman, "La Belle Bête", à l'âge de vingt ans. L'ouvrage est acclamé par la critique, ainsi que tous ses futurs romans, poèmes et pièces de théâtre. Avec le Prix Médicis, qui lui est décerné en 1966 pour "Une saison dans la vie d'Emmanuel", sa réputation franchit l'océan. Elle siège à l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, devenant la première femme écrivain du Québec à être admise à une académie littéraire européenne. Marie-Claire Blais, 66 ans, un petit bout de femme au charisme impressionnant, est aujourd'hui considérée comme l'une des meilleures romancières au monde. A la mi-mars, elle est venue à Prague pour rencontrer, au café de l'Institut français, ses lecteurs et traducteurs tchèques. Une lecture des extraits de ses romans était, évidemment, à l'affiche...

Marie-Claire Blais : "Il s'agit de romans qui ont été traduits en tchèque dans les années 60, au moment de la remise du Prix Médicis. Je n'avais jamais rencontré les traducteurs, mais j'avais vu ces livres. A l'Institut, nous avons donc fait des lectures d'Une saison dans la vie d'Emmanuel et des Manuscrits de Pauline Archange. Moi, j'ai lu des extraits d'un livre qui sera peut-être bientôt en traduction, car un éditeur pragois s'y intéresse. C'est une trilogie et j'ai présenté son premier volume qui s'appelle, comme toute la trilogie, Soif."

Quel est son sujet ?

"C'est une étude assez longue qui se passe sur quinze ans, en Amérique du Nord, mais ce sont des événements très contemporains que nous connaissons. Les personnages sont également des gens d'aujourd'hui, avec des problèmes d'aujourd'hui : les réfugiés de Cuba, les intellectuels et les pauvres, dans une petite ville des Caraïbes. L'atmosphère est paradisiaque, mais les problèmes du monde sont à l'intérieur de la petite île."

Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire, tout au début de votre carrière ?

"J'ai commencé à écrire très jeune, je crois que c'était mon désir le plus profond. J'étais faite pour écrire, comme d'autres naissent pour être musiciens par exemple. L'important, pour moi, était d'exprimer ce qu'un jeune écrivain pouvait ressentir à l'époque, dans les années 60, et aujourd'hui, d'exprimer ce que les gens autour de moi peuvent ressentir. Nous vivons dans un monde très complexe, toujours en danger, mais toujours avec une volonté de bonheur."

Portez-vous un regard pessimiste sur ce monde, comme c'est le cas de beaucoup de gens aujourd'hui ?

"Je ne dirais pas pessimiste. Je dirais, j'espère, lucide et intelligent. Personnellement, je garde une très grande confiance que nous ne serons pas assez fous pour tout anéantir autour de nous."

A Prague, vous êtes l'invitée des Journées de la francophonie. Qu'est-ce que la francophonie pour vous ?

"D'écrire dans la langue française, c'est déjà un grand défi, parce que la langue est si belle, si somptueuse et si exigeante pour un écrivain... Au Canada, par exemple, nous avons le devoir de la préserver."

Sauriez-vous définir la mentalité canadienne ?

"Ah, c'est trop complexe... Etant donné que nous avons déjà deux cultures et une immense littérature des deux côtés, presque aussi riche l'une que l'autre. C'est échange, entre nous, est quand même bouleversant : les écrivains du Canada anglais nous découvrent et nous les découvrons, même s'il y a eu beaucoup de retard dans tout cela."

Auteur: Magdalena Segertová
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