Le tricentenaire de Marie-Thérèse, l’unique reine de Bohême

Marie-Thérèse

Samedi 13 mai, 300 ans se seront écoulés depuis la naissance de Marie-Thérèse (1717-1780), archiduchesse d’Autriche, reine de Bohême et de Hongrie. De nombreuses expositions, festivités et biographies accompagnent, partout en Europe, le tricentenaire de la mère de Marie-Antoinette, laquelle passe pour avoir été une réformatrice talentueuse et a été surnommée la « mère et belle-mère de l’Europe ».

Marie-Thérèse
Il n’empêche que certains historiens révèlent désormais les facettes moins connues de la souveraine autrichienne, la présentant plutôt comme une femme de pouvoir froide et sans pitié. Comment était Marie-Thérèse, selon les biographes et historiens tchèques et français ? Quelle empreinte a-t-elle laissé sur les pays tchèques ? Nous essayerons de répondre à ces questions dans une série d’émissions consacrées à celle qui fut aussi l'impératrice consort du Saint Empire romain germanique, dont nous vous présentons aujourd’hui la première partie.

Les cloches des églises viennoises ont annoncé, au petit matin du 13 mai 1717, la naissance d’une fille à la Hofburg, le palais qui a servi pendant plus de 600 ans de résidence à la dynastie des Habsbourg. Le bébé reçoit au baptême les prénoms de Maria Theresia Walburga Amalia Christina. Si son père Charles VI avait désigné sa fille, avant même sa naissance, comme héritière du trône, il espérait toutefois jusqu’à sa mort accidentelle, survenue en 1740, l’arrivée d’un successeur de sexe masculin.

Soucieux de l’indivisibilité de la monarchie danubienne, l’empereur du Saint empire germanique Charles VI avait alors prévu par la « pragmatique sanction » que son héritage reviendrait à sa fille aînée, Marie-Thérèse. C’est ainsi qu’elle accède à la tête de la monarchie des Habsbourg en 1740, alors qu’elle est âgée de seulement 23 ans et enceinte du troisième de ses seize enfants. La succession ne se fait cependant pas sans heurt et Marie-Thérèse éprouve des difficultés à faire reconnaître ses droits aux trônes de son père, comme nous le raconte l’historien Eduard Maur :

« Plusieurs Etats ont essayé de profiter de cette occasion pour conquérir plus du pouvoir en Europe. C’est notamment la France qui a contesté les droits héréditaires de Marie-Thérèse. La France voulait surtout avoir son allié à la tête du Saint-Empire germanique, le poste d’empereur étant occupé, depuis le XVe siècle, par les Habsbourg. Le choix français s’est porté sur Charles-Albert, électeur de Bavière. La France a réussi à former une coalition constituée par la Bavière, la Saxe, la Prusse, l’Espagne et la Savoie. Leur but était d’affaiblir l’influence politique de Marie-Thérèse et, par conséquent, de toute la dynastie des Habsbourg. Cette coalition a réussi, en janvier 1742, à faire couronner Charles-Albert empereur germanique. »

La érémonie de couronnement de Marie-Thérèse
Charles-Albert VII prend également la couronne de la Bohême que Marie-Thérèse avait pourtant héritée de son père. Ayant été éduquée en princesse inoffensive, pas du tout préparée au pouvoir et encore moins à mener des guerres, Marie-Thérèse avait surtout appris, dans son enfance et sa jeunesse, à parler plusieurs langues, à maîtriser l’art de la conversation, à chanter et à danser. Peu préparée à ses fonctions, la jeune souveraine surprendra par son courage et ses capacités diplomatiques incontestées : confrontée à des conflits militaires tout au long de son règne, elle aura, certes, perdu la région riche et stratégique de Silésie, ainsi que des territoires en Italie, mais le reste des possessions héréditaires des Habsbourg sera sauvegardé. Conformément au vœu de son père, Marie-Thérèse restera alors, pendant quarante ans, à la tête de l’archiduché d’Autriche, ainsi que des royaumes de Hongrie et de Bohême.

Le 13 mai 1743, le jour de son 26e anniversaire, Marie-Thérèse est couronnée reine de Bohême à la cathédrale Saint-Guy, à Prague. Eduard Maur nous en dit plus sur cet événement :

« Cette cérémonie de couronnement s’est déroulée dans un contexte tout particulier : Prague était ravagée par les combats entre les armées autrichienne et française. Dans les documents de l’époque, on peut lire par exemple qu’il a été ordonné, pour cette occasion, de retirer les cadavres des rues de la ville. Mais la somptueuse cérémonie s’est bien déroulée : avant d’arriver au Château de Prague, le cortège est passé par la Nouvelle et la Vieille ville de Prague, ainsi que par le quartier de Malá Strana. Sauf que Marie-Thérèse n’a pas été couronnée par l’archevêque de Prague, comme le voulait la tradition, mais par l’évêque d’Olomouc. L’archevêque de Prague, quant à lui, a été assigné à domicile, du fait de sa collaboration avec les Français. Les festivités qui ont suivi le couronnement ont été grandioses : on a organisé des bals, des spectacles d’opéra, la reine a été reçu par la noblesse, elle a visité la campagne… C’était une fête spectaculaire pour les Pragois. »

La mini-série de la Télévision tchèque 'Marie-Thérèse',  photo: ČT
Durant son règne, Marie-Thérèse a entrepris plusieurs réformes importantes, notamment celles du système juridique et de l’enseignement, réformes que nous évoquerons dans nos prochaines émissions. Sans oublier la reconstruction totale du Château de Prague, impulsée par la souveraine. C’est justement au Château de Prague que se dérouleront, le samedi 13 mai, les principales festivités liées au tricentenaire de Marie-Thérèse. A cette occasion, le public est invité à découvrir une reconstitution de la cérémonie du couronnement.

Une mini-série de la Télévision tchèque actuellement en tournage devrait mettre l’accent sur deux autres aspects du règne de Marie-Thérèse ; les premières années dramatiques après son accession au pouvoir, de même que son mariage avec François-Etienne, duc de Lorraine, une liaison considéré presque comme idyllique. Une cinquantaine d’acteurs, originaires de plusieurs pays, apparaîtront dans cette série. Le tournage se déroule dans la ville historique de Kroměříž, au château de Valtice, ainsi qu’à Vienne, à Bratislava ou encore en Toscane. La série, intitulée tout simplement Marie-Thérèse, sera diffusée à la Télévision publique tchèque à Noël.