La Compagnie des pieds perchés présente à Prague son spectacle

Photo: Katy Dubois

En mars dernier, Radio Prague avait visité le tout nouveau Centre du nouveau cirque, Cirqueon, installé à Nusle. Le nouveau cirque est né dans les années 1970 en France en réaction contre une forme de cirque plus « traditionnelle » avec dompteurs et animaux. Ce n’est réellement qu’après la révolution de velours que le nouveau cirque a percé en République tchèque. A Cirqueon, Radio Prague avait rencontré une acrobate suisse, installée à Prague, Stéphanie N’Duhirahe. Son outil à elle, c’est la corde et avec sa partenaire de cirque d’enfance, Morgane Widmer, elles ont monté une compagnie et présentent la semaine prochaine un spectacle au club Mlejn. Rencontre.

Foutaise,  photo: Marion Burnier
MW : « Je m’appelle Morgane, je viens de Suisse, j’ai commencé le cirque quand j’avais sept ans avec de nombreuses disciplines, le monocycle, le diabolo... Plus tard, je me suis perfectionnée dans la corde. Je suis ensuite partie à Bruxelles faire une école professionnelle là-bas, pour trois ans. J’ai fini en été 2009. Depuis, avec Stéphanie, on a décidé de monter notre compagnie et c’est ce qu’on va présenter à Prague ce mois-ci. »

Avant de parler de ce spectacle en particulier, j’aimerais te poser la même question que celle que j’avais posée à Stéphanie en mars dernier : pourquoi la corde ? Qu’est-ce qui fait que c’est la corde qui a gagné tes faveurs plutôt qu’autre chose ?

MW : « Grande question ! Je crois que c’est une question de ‘feeling’, c’est la discipline à laquelle j’ai le plus accroché. J’aime bien que ce soit simple, c’est vraiment juste une ligne et nous devons tout faire autour pour lui donner vie. Donc je pense que c’est la simplicité de l’objet qui me plaît. »

Photo: Cirqueon
Stéphanie, on s’était rencontrées en mars dernier. C’était les débuts du Centre du nouveau cirque Cirqueon où tu commençais à donner des cours. Comment ça se passe ? Comment se sont déroulés ces derniers mois ?

SN : « En fait, je passe plus de temps loin de Prague qu’ici. Je n’ai pas l’occasion de donner des cours toutes les semaines, donc c’est plutôt des workshops sur le mois. J’ai eu différents contrats qui m’ont envoyée deux mois à Paris, deux mois dans le sud de la France. Mais là je suis revenue depuis septembre et j’ai envie de rester plus longtemps, histoire de me poser. »

A l’époque le centre Cirqueon « en dur » existait depuis peu. Comment ça se passe pour le centre ?

SN : « De ce que j’en vois, je trouve que ça s’est bien mis en marche... Il y a beaucoup de cours le soir : de l’aérien pour adultes, pour enfants, des cours d’acrobaties. Donc ils ont vraiment mis un programme en route qui marche bien avec des cours différents chaque soir. Et puis il y a aussi une petite bibliothèque qui est consacrée aux arts du cirque. Il commence à y avoir une bonne documentation et les gens commencent à bien connaître l’endroit. »

Vous avez donc toutes deux préparé un spectacle que vous allez présenté au club Mlejn, à Prague. Ca s’appelle ‘Foutaise’, expliquez-nous cela...

MW : « C’est le mot qu’on aimait bien, au départ. La sonorité... Dans le spectacle, on a beaucoup de conditionnement, de choses qu’on doit faire, avec un moment où tout part un peu n’importe comment. C’était une manière de dire que tout peut être ‘foutaise’. »

Est-ce que vous pourriez décrire le spectacle, ce qui se passe à la corde, dans les airs ou sol ?

SN : « On a créé un univers de cordes et ce sont deux personnages qui vivent dans cet univers. Comme disait Morgane, on travaille dans l’idée de la contrainte : il y a des contraintes physiques, entre nous deux, des contraintes de cordes... mais il y a des contraintes extérieures comme une sonnerie qui va nous rappeler à l’ordre. L’idée, c’est cela : des choses très précises à faire sur la corde et entre, des moments de pause, comme au quotidien, où on peut jouer, s’ennuyer... C’est un peu comme la vie au quotidien, implanté dans un univers créé par nous, un univers de cordes. »

Comment avez-vous monté le spectacle ? Est-ce que vous avez travaillé toutes les deux ou avec un metteur en scène ?

Photo: Katy Dubois
SN : « On a commencé à travailler toutes les deux. On avait les mêmes envies parce qu’on se connaît depuis longtemps, on a été élevées dans le cirque ensemble... Donc on a créé le spectacle à deux. Ensuite on a pu le retravailler avec un metteuse en scène, Julie Burnier, qui est suisse. On a travaillé avec elle pendant une semaine pour tout clarifier, pas du tout la technique. Pour nous, c’est l’histoire qui est importante : nous ne voulons pas faire un spectacle de cordes, mais créer une histoire, un univers. Julie nous a aidées pour la mise en scène et pour régler les jeux entre les deux personnes. »

Toujours côté mise en scène, est-ce que vous travaillez avec de la vidéo, du son ?

MW : « Sur scène on a de la musique tout le long. Mais sinon, pas d’autres effets spéciaux. On a juste nos objets et notre univers. »

Tout ce travail c’est le fruit d’une compagnie, la vôtre. C’est la Compagnie des pieds perchés... Est-ce que vous préparez d’autres spectacles ici en République tchèque ?

MW : « On l’espère ! En faisant ce premier spectacle, de notre propre initiative, sans soutien, sans aide, ça donne aussi envie de mettre au point d’autres idées, de créer des structures pour lesquelles on puisse demander des subventions. Ce premier projet, on y a mis surtout de nous-mêmes. On n’a pas été aidées. Là, on se disait qu’on pouvait monter un projet avec une structure extérieure, pour qu’on n’ait pas à tout faire... »

Tous les ans en août se déroule le festival de nouveau cirque Letni Letna qui a un beau petit succès depuis plusieurs années. Est-ce que vous allez vous y produire ?

Foutaise,  photo: Marion Burnier
SN : « On espère ! C’est un de nos projets. On verra si c’est possible. On essaye de trouver des festivals où jouer ce spectacle. C’est d’après moi intéressant de jouer en République tchèque parce que la corde, c’est très peu connu ici. Il y a peu de gens qui en font, et des spectacles de cordes, je ne pense pas qu’il y en ait vraiment. Donc, ça amène quelque chose de plus par rapport à un spectacle en France et en Belgique. »

Tu dis que la corde n’est pas très connue ici. Quelles sont les directions que prennent les artistes de cirque en République tchèque ?

SN : « Déjà, il n’y a pas beaucoup d’artistes de cirque, ni de compagnies qui sont visibles hors du pays. Autrement, ils feront plutôt de l’aérien, ou utiliser du tissu qui est très visuel, c’est quelque chose qui marche tout de suite parce que ça a une image plus féérique. Et puis aussi le trapèze, utilisé depuis longtemps. La corde c’est quelque chose de plus brut, c’est beaucoup de douleurs, il faut les surpasser... »

On rappelle quand se déroule votre spectacle, Foutaise, et où ?

SN : « C’est le 27 janvier à partir de 19h30, au club Mlejn. »

www.mlejn.cz