Jan Palach 38 après

Jan Palach
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Il y a quelques jours, on s'est rappelé la mort martyre de l'étudiant tchèque Jan Palach qui s'était immolé, en janvier 1969, par le feu en signe de protestation contre l'occupation du pays par l'armée soviétique. L'hebdomadaire Respekt s'interroge sur ce comment son acte est perçu aujourd'hui.

« Le sacrifice de Palach a-t-il été vain ? » Voilà l'interrogation que pose un autre article paru dans la dernière édition de l'hebdomadaire Respekt, quelques jours après le 38ème anniversaire de la mort de cet étudiant tchèque qui s'était immolé par le feu, le 16 janvier 1969. Pour toute une génération des Tchèques qui ont vécu l'écrasement du Printemps de Prague par les chars soviétiques et la sinistre période de « normalisation » qui s'en est suivie, Jan Palach représente un personnage emblématique et incontournable. Et pour les autres ?

« L'ensemble des historiens se mettent d'accord que Jan Palach représente une grande et marquante figure de l'histoire nationale. Pourtant, on ne trouve ne serait-ce qu'un seul historien à s'occuper vraiment de lui. Il n'existe aucune étude historique qui lui soit consacrée et il n'y a qu'un seul ouvrage biographique sur Palach qui avait été d'ailleurs écrit dans les années soixante-dix déjà et qui est donc paru, à l'époque, dans la clandestinité », constate le journal.

Un trop grand respect face à cet ultime sacrifice et à une grande légende, de grandes exigences imposées par un pareil travail, sur le plan psychologique notamment, des interprétations ambiguës du Printemps de Prague... Autant d'arguments qui veulent expliquer une certaine réticence ou pudeur des historiens tchèques, concernant Jan Palach. Les manuels scolaires tchèques ne s'avèrent pas plus éloquents.

« La mort de Palach a réveillé l'opinion et son enterrement s'est transformé en une manifestation nationale contre les occupants. Cet acte dramatique n'a toutefois pas réussi à empêcher que les réformes entamées ne soient abandonnées pour de bon ». Voilà le texte identique que l'on peut trouver dans les manuels scolaires d'histoire moderne, qu'ils soient publiés par telle ou telle maison d'édition.

L'article paru dans l'hebdomadaire Respekt a interrogé des jeunes dans plusieurs écoles de Prague pour savoir ce qu'ils pensent de Jan Palach. Celui qui, dans une récente enquête télévisée proposant aux téléspectateurs de choisir « Le plus grand parmi les Tchèques », s'est classé en 45ème position, même derrière le premier président communiste stalinien tchécoslovaque, Klement Gottwald.

Si les étudiants du cycle secondaire semblent pour la plupart savoir situer l'acte de Jan Palach dans le contexte de l'époque, ses interprétations sont contradictoires.

« Il faut d'abord tout essayer, s'opposer au régime plutôt que de s'immoler par le feu »... « Si l'on voyait ça dans un film, on comprendrait mieux »... « D'un côté, on dit qu'il s'est sacrifié pour la liberté, d'un autre côté, on peut croire qu'il avait des problèmes personnels »... « Pour nous, ce ne sont que des phrases dans un manuel, on ne comprend pas pourquoi cette histoire excite autant de gens ». Voilà quelques réactions retenues par le journal qui cite aussi l'avis d'une prof d'histoire d'un lycée de Prague :

« L'attitude des jeunes d'aujourd'hui a des racines plus profondes. Ils estiment que quand il y a un mal, il faut y répondre par une action constructive et non pas par l'autodestruction. Pour cette raison, ils s'identifient plus facilement aux souvenirs des gens de la résistance anticommuniste qu'au sacrifice de Palach ».

Le journal indique à la fin qu'aucun représentant politique ne s'est incliné, cette année, devant le monument de Jan Palach, sur la place Venceslas.