Coronavirus : avec un site d’information en français, la Chambre de commerce franco-tchèque se veut au plus près des entrepreneurs

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Quelles sont les conséquences de la crise du coronavirus sur les entreprises étrangères, et notamment françaises, très nombreuses, implantées en République tchèque ? C’est une des questions que s’est posées la Chambre de commerce franco-tchèque (CCFT). Des questions qu’elle a aussi posées, fin mars, à près de 70 sociétés membres dans le cadre d’un sondage. Directeur de la CCFT, Michal Macko en présente les principaux enseignements :

Michal Macko | Photo: CCFT
« Toute cette crise et les mesures qui l’accompagnent ont un impact sur l’ensemble de l’économie et sur toutes les personnes. Nous avons reçu beaucoup de questions de nos sociétés membres et de ressortissants français sur ces mesures qui ont été prises par le gouvernement tchèque. Au-delà de toutes celles d’ordre général, ces questions portent plus concrètement sur les aspects financier, ressources humaines ou encore logistique. »

« La CCFT s’est donc adaptée, car nous avons une mission d’appui et de soutien vis-à-vis des entreprises présentes en République tchèque. C’est pourquoi nous avons décidé de décrire ce qui se passe en traduisant et en rédigeant déjà plus de 70 textes pour que ces entreprises puissent être informées le plus précisément possible. Nous avons donc mis en place un site Internet consacré spécialement au coronavirus qui présente toutes les mesures d’accompagnement et de soutien pour les entreprises (https://www.chambre.cz/des-actualites/coronavirus.html). Toutes les informations, que nous consultons avec nos sociétés membres et différents experts, sont disponibles en français. Les statistiques du site le confirment : il existe une très forte demande pour ce type d’informations. »

Quels sont les grands enseignements que vous avez retirés du sondage?

Photo: CCFT
« Ce qui en ressort d’abord, c’est quel que soit leur secteur d’activité ou leur taille, toutes les entreprises sont touchées. C’est là un constat global. Plus de 90% des sociétés membres sollicitées ont été confrontées à une baisse de leur activité et une entreprise sur deux s’attend à ce que la situation s’aggrave en avril avec une baisse du chiffre d’affaires d’au moins 40%. Par ailleurs, plus de 60% d’entre elles ont déjà été contraintes de réduire ou d’interrompre leur activité. »

« Plus de la moitié des PME qui ont participé à notre sondage sont confrontées ou prévoient d’être confrontées à des problèmes de trésorerie. En revanche, seuls 20% des grandes entreprises ont cette crainte. »

Il est beaucoup question de chômage partiel ou technique. Quelles sont les différences que vous remarquez entre la notion qu'ont les Tchèques et les Français de ce dispositif ?

« Dans les faits, il n’existe pas de grandes différences. Le chômage partiel ou technique existe dans la loi tchèque depuis longtemps. Les sociétés ont donc pu recourir à cette mesure. Les conditions auxquelles vous pouvez réduire le temps de travail de vos salariés, et donc leurs salaires, sont bien décrites dans le Code du travail. Une des seules différences entre la France et la République tchèque concerne le montant de l’indemnité que les entreprises sont tenues de verser. »

« En République tchèque, le chômage partiel comme on l’entend en France, correspond au ‘kurzarbeit’, c’est-à-dire que l’Etat apporte une contribution aux entreprises pour le règlement des salaires. C’est d’ailleurs là le texte le plus recherché sur notre site Internet. Toutes ces nouvelles mesures ont été adoptées par le gouvernement tchèque le 31 mars et, depuis le 6 avril, il est possible de formuler des demandes d’aide. »

« En résumé, les entreprises en République tchèque pouvaient déjà recourir au chômage technique avant la crise, mais l’Etat n’apportait pas de contribution. Pour ce qui est du ‘kurzarbeit’, c’est désormais la même chose dans les deux pays : l’Etat contribue, même si les sommes sont bien sûr différentes. »

Une économie tchèque très dépendante de l’évolution de la situation en Europe

Photo illustrative: Gerd Altmann/Pixabay,  CC0
La République tchèque compte parmi les pays européens les moins endettés, où la dynamique économique est positive depuis plusieurs années déjà. Cette bonne santé incite-t-elle les entreprises à rester optimistes? Et quelles sont leurs attentes par rapport au gouvernement tchèque?

« Pour ce qui est de l’optimisme, tout dépendra de la durée des mesures exceptionnelles de restriction et de confinement. Dans le sondage, plus de la moitié des entreprises ont répondu qu’elles s’attendaient à de graves pertes et à une chute de la demande pour le mois d’avril. Elles prévoient une même évolution pour le mois de mai également, mais pour la suite elles ont forcément très peu de visibilité. »

« Quant à leurs attentes vis-à-vis du gouvernement, c’était d’abord une réaction rapide, un système compréhensible d’accès aux mesures de soutien, et des mesures claires, concrètement les suivantes : le ‘kurzarbeit’, la compensation des surcoûts liés à la quarantaine, le report de certains paiements et remboursements et le soutien de l’Etat pour des prêts à taux réduits, voire à un taux zéro. »

En 2008-2009, la République tchèque avait plutôt bien traversé la crise économique, moins douloureusement en tous les cas que pas mal d'autres pays. Un peu plus de dix ans plus tard, cette expérience peut-elle contribuer à entretenir une certaine confiance pour les mois à venir et la relance de l'activité ?

« Je n’en suis sûr. La crise de 2008-2009 était très différente de celle d’aujourd’hui. C’était une crise financière qui provenait des Etats-Unis. A l’époque, les banques tchèques étaient dans une bonne condition, et même dans une meilleure condition que la plupart des banques en Europe. Si la République tchèque a plutôt bien supporté les effets de cette crise, c’est parce que celle-ci n’a pas frappé l’économie dans sa globalité. Cette fois, c’est très différent. Tous les secteurs et toutes les entreprises sont touchés. »

Photo illustrative: public domain
« Ceci dit, c’est vrai que l’économie tchèque se portait assez bien, malgré un léger ralentissement ressenti en début d’année. Il y avait moins de 3% de chômage, l’endettement du pays est un des plus faibles en Europe, etc. Mais là, l’économie s'est arrêtée de tourner comme si on avait appuyé sur un bouton rouge. Encore une fois, tout dépendra de la longueur de cet arrêt et du maintien des mesures de restriction. »

« Et puis le point très important pour l’économie tchèque, c’est son ouverture : plus de 80% de ses exportations se font sur le marché européen. Il faudra donc voir quelle sera l’évolution de la situation chez nos principaux partenaires, qu’il s’agisse de l’Allemagne, de la Slovaquie ou de la France. Tout est lié, nous ne vivons pas seuls. Si les pays partenaires se remettent bien, si l’Allemagne se remet bien, et notamment le secteur de l’industrie automobile qui est primordial pour l’économie tchèque, on peut s’attendre à une reprise plus rapide… Mais bien malin celui qui, aujourd’hui, pourrait dire quelle sera la longueur de cet arrêt. »